Chronique

Hein Westgaard Trio

First as Farce

Hein Westgaard (g), Petter Asbjørnsen (b), Simon Forchhammer (dms).

Label / Distribution : Nice Things Records

L’uniformité du son gagne bon nombre de guitaristes ; sortir du lot n’est pas aisé lorsque des centaines d’instrumentistes ont bénéficié d’un même enseignement. Il faut alors trouver sa voie et avant tout sa voix. Si Mary Halvorson est celle qui a admirablement marqué les esprits ces dernières années, Hein Westgaard n’est pas en reste et mérite lui aussi une écoute attentive.

La Norvége est une terre d’aventuriers réfléchis ; Hein Westgaard en est l’illustration. Il ne laisse rien au hasard, ses compositions allient une construction mélodique originale à un espace idyllique qui sublime l’improvisation. La conception originale de l’album, qui intercale entre les titres quatre courtes pièces intitulées « Year Of The Rat », variées et coécrites avec le contrebassiste Petter Asbjørnsen, laisse transparaître l’intention du guitariste.

On y trouve également deux comptines exploratrices de nouveaux territoires « Einstein E.T. Morph », aigre-doux, et « Asteroid Nightwear » à l’atmosphère lunaire issue en droite ligne des expériences soniques d’Augusto Mancinelli et de Philippe Deschepper. Le batteur Simon Forchhammer s’accole aux cassures rythmiques du guitariste, remarqué dans l’album Timestretch de la saxophoniste Mia Dyberg. Il contribue pleinement à la réussite de First As Farce par sa frappe souple. Le découpage rythmique de « Swineherd Agitator » intensifie l’énergie brute déployée par ce trio capable d’évoquer de façon déconcertante la mémoire du jazz dans « Wayne’s Horse Farm ».

Lorsque l’album Gateway de John Abercrombie, Dave Holland et Jack DeJohnette est sorti en 1975, il bouscula le monde de la guitare par sa force novatrice ; avec First As Farce le trio d’Hein Westgaard participe aujourd’hui à de nouvelles audaces.

par Mario Borroni // Publié le 17 mars 2024
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