Chronique

Antonin Pauquet

Brumes

Antonin Pauquet (b), Christelle Raquillet (fl), Benoît Andrieux (ts, ss), Fabien Magnin (ss), Sacha Souêtre (dms)

Label / Distribution : Chanteloup Musique

Passionné par les musiques traditionnelles, et plus particulièrement par celles des régions françaises et de l’Ouest de l’Europe, le contrebassiste Antonin Pauquet a conçu un quintet pour leur rendre hommage et les visiter. Déjà impliqué dans cette direction avec son orchestre L’Itération des Ondes, Pauquet a choisi avec Brumes d’être plus voyageur. De se promener, littéralement. « Scottish à micaillet », qui ouvre ce premier album, en est l’illustration : base rythmique puissante et volubile (très efficace Sacha Souêtre à la batterie, à suivre) avec des soufflants qui semblent rentrer dans la ronde. On y retrouve notamment la flûtiste Christelle Raquillet, qu’on a remarquée par ailleurs dans le Mons Tumba de Robin Antunes ou chez Laurent Dehors. Ici, c’est elle qui mène la danse sur « Rondrill » et sa tournerie celte bien cadrée par une contrebasse sèche et souple à la fois.

Nous ne sommes pas ici dans une démarche de folklore imaginaire tel que l’ARFI l’incarne depuis un demi-siècle. « La Yonnaise », où l’on remarque les saxophones primesautiers de Fabien Magnin et Benoît Andrieux, est une danse maraîchine toute droit sortie de la tradition vendéenne ; de même, « Vent d’Est » et son très beau tutti s’épice de timbres glanés par des voyageurs des Balkans. Brumes ne cherche pas à créer des pays de Cocagne, mais plutôt sa grammaire dans des parchemins oubliés, faite de bourrées et de passacailles, avec une joliesse qui n’en fait jamais trop mais pourrait parfois sortir des chemins balisés, ce que l’orchestre parvient à faire dans « Martin Pêcheur », sans conteste le sommet d’un premier album plein de promesses : on songe notamment au Vanneau Huppé du collectif Spatule.

Ce n’est pas un hasard si Brumes c’est retrouvé cette année parmi les finalistes de Jazz Migration #10. Joyeux et volontiers chahuteur sur scène, le quintet représente la jeune génération dans une direction musicale chère au jazz hexagonal. Pauquet n’en est pas à son coup d’essai, on écoutera notamment Parpaing en duo avec le violoniste Augustin Lusson, qui joue aussi la « Scottish à Micaillet ». On a le sentiment, à l’écoute de l’album, que ces musiciens ont de belles années devant eux. Raison supplémentaire pour s’y intéresser dès maintenant.